Historique, Littérature canadienne (Canada), Livres

Une petite servante savante de Lise Antunes Simoes

Une petite servante savante de Lise Antunes Simoes

Éditeur : Bibliothèque Québécoise
Pages : 288 pages
Parution : 15 Mars 2022

 

Résumé :

À la ferme des Lowell, le travail est pénible, mais Fanny a l’habitude d’obéir et ne se plaint pas. Jusqu’au jour où son père décide subitement de la placer comme domestique. Elle qui n’a jamais quitté sa campagne du Wiltshire, la voilà projetée dans le grand Londres victorien !

Là-bas, le quotidien est tout aussi dur. Des journées harassantes, des serviteurs indifférents, des maîtres qu’elle ne voit jamais, des réceptions qui s’enchaînent avec une quantité vertigineuse de plats à préparer et de vaisselle à laver. Sans parler de Mrs. Taylor, l’intendante autoritaire qui règne sans partage sur ce petit royaume.

Fanny semble destinée à une vie de soumission. Mais elle a la chance d’être un peu plus éduquée qu’on pourrait le penser. Et s’il existait pour elle un autre avenir ?

 

Mon avis :

Au cœur de Mildenhall au XIXème, vit une famille de metayer, les Lowell. Alors que leur mère est malade, il en revient à Fanny, la seule fille de la famille, de faire vivre cette maisonnée. En compagnie de ses trois frères et de leur père, la tâche est dure pour Fanny même si elle n’en montre rien. Quelques bouleversements vont l’amener à Londres et devenir aide cuisinière. Très peu habituée à servir l’aristocratie, elle va devoir apprendre beaucoup de choses.
Pendant près de deux ans, on suit l’évolution de la jeune fille vers une nouvelle destinée qu’elle n’a pas vu venir…

D’origine modeste, la mère de Fanny, a tout de même voulu que sa fille reçoit un apprentissage. Ainsi, un pasteur lui inculque de nombreuses leçons (histoire, théologie, littérature…) quand elle dispose de temps pour étudier. Au fur et à mesure que la maladie de sa mère évolue, ce temps se fait plus rare, et surtout ça ne plait pas à son père. En devenant domestique, la jeune fille se rend vite compte que ces connaissances aides, aussi bien qu’elles surprennent. Son intégration avec le personnel en place n’est pas évidente et elle étonne aussi par sa résilience. Toutefois, elle arrive à gagner la confiance et le soutien de certains membres de la grande maison qui vont lui permettre d’enrichir encore ces compétences et d’évoluer vers d’autres fonctions qui lui correspondent mieux.

Très vite on s’attache au personnage de Fanny. Elle est tellement courageuse. Tout ce qu’elle doit encaisser sans avoir son avis à donner est impressionnant. Au début de l’histoire, elle m’a fait penser à Catherine Morland dans Northanger Abbey de Jane Austen. Même si elles n’ont pas les mêmes origines sociales, elles sont admiratives de la littérature, sincères et déterminés.

Richement documenté, c’est intéressant de suivre le parcours des domestiques, leurs fonctions et de découvrir comment s’articule la vie dans une grande maison. Régit par trois frères et leur intendante, on reste principalement avec les serviteurs. Bien entendu, au fil de ma lecture j’ai aussi pensé à quelques scènes de la série anglaise Downton Abbey.

En soit, un bien beau roman historique centré sur les premiers pas d’une domestique et ses ambitions pour évoluer dans la vie.

note 4,5 étoiles

Historique, Littérature française (France), Livres

Double Morale de Gaelle Magnier

Double Morale de Gaelle Magnier

Éditeur : Séma
Pages : 266 pages
Parution : 30 Septembre 2020

 

Résumé :

Londres, 1895
Alors que le procès d’Oscar Wilde occupe les colonnes de la presse londonienne, la jeune Betty découvre une aristocratie hypocrite qui met à mal sa bonne éducation.
En entrant au service des Trengove en tant que gouvernante, elle se rend rapidement compte qu’un secret pesant, lié à la présence de William Goodfeather – étudiant en arts à la Royal Academy – vient perturber l’équilibre de cette famille de bonne réputation.
Lors d’une des célèbres soirées de Lady Trengove, Betty fait la connaissance du capitaine Ashby, qui partage son sentiment quant à la double morale de la noblesse anglaise…

 

Mon avis :

Bien que le poste de gouvernante soit le plus souvent réservé à des dames désargentées, les conditions modestes de Betty ne sont pas un problème. Grâce à l’instruction qu’elle a pu recevoir, elle a appris à lire, à écrire et à compter durant sa jeunesse. Tout juste engagée auprès de la famille Trengove pour s’occuper de deux enfants, elle s’étonne de savoir que le personnel n’est pas fidèle et que la famille a du mal à recruter.

Parfaite en apparence, celle-ci cache en effet bien des secrets. Lady Trengove aime organiser régulièrement des soirées chez elle, au bras de son mari. Ce dernier travaille à la Royal Academy et y enseigne. Lors d’une soirée, elle se rend compte qu’un certain étudiant William Goodfeather est souvent présent au sein de la maison. C’est aussi ce jour là, qu’elle va faire la rencontre de son ami, le capitaine Ashby qui s’apprête à quitter l’Angleterre pour une mission en Inde. Avec en toile de fond le procès d’Oscar Wilde qui l’oppose au père d’Alfred Douglas, la famille des Trengove ont finalement bien des points communs avec cette affaire en cours…

Ce roman nous offre un plongeon au cœur du XIXème où les apparences sont toujours très importantes. Ce qui se passe avec Oscar Wilde choque les mœurs. Cette histoire fait parler et fait la une des journaux. L’ajout de ce fait historique à la narration l’a rend encore prenante. Et autant dire que l’auteure s’y connait. Elle fait des révélations à la fin de l’ouvrage sur la construction de son roman. D’ailleurs on retrouve intégrés des extraits du procès contre l’auteur irlandais.

Le personnage de Betty est très intéressant. Attachante et courageuse, on suit avec plaisir les nouvelles péripéties qui l’attendent. Son histoire d’amour avec le capitaine Jeremy Ashby m’a un peu dérangée au début. Tombée amoureuse après une rencontre brève et quelques échanges de lettres… Bref, ça se faisait à l’époque et ce n’est pas la première fois que je lis ce genre d’histoire. Ouverte d’esprit, j’ai apprécié ses réactions qu’elle a pu avoir au court du roman. Elle n’a pas la langue dans sa poche et sait réagir face aux imprévus.

En soit, un bon roman historique enrichi de nombreux faits réels qui apportent une force au roman.

note 3,5 étoiles

Historique, Littérature anglaise (Angleterre), Livres

Les tribulations d’une cuisinière anglaise de Margaret Powell

Les tribulations d'une cuisinière anglaise de Margaret Powell

Éditeur : Payot
Pages : 288 pages
Parution : 7 Mai 2014
Genre: Historique

 

Résumé :

Dans l’Angleterre du début des années 1920, la jeune Margaret rêve d’être institutrice, mais elle est issue d’un milieu modeste et doit entrer en condition. De fille de cuisine, elle devient rapidement cuisinière, un titre envié parmi les gens de maison. Confinée au sous-sol de l’aube à la nuit, elle n’en est pas moins au service de ceux qu’on appelle Eux, des patrons qui ne supporteraient pas de se voir remettre une lettre par un domestique autrement que sur un plateau d’argent. Elle saura leur tenir tête et rendra souvent son tablier pour améliorer ses conditions de travail, jusqu’à ce qu’elle trouve enfin, sinon le prince charmant, du moins le mari qui l’emmènera loin des cuisines des maîtres.

Grâce à son franc-parler aux antipodes des récits de domestiques anglais trop parfaits, ce témoignage paru en 1968 a valu la célébrité à Margaret Powell (1907-1984). Quarante plus tard, il a inspiré le scénariste de «Downton Abbey» alias Julian Fellowes.

 

Mon avis:

Ce roman autobiographique retrace la vie de Margaret Powell, de son enfance à Hove (près de Brighton) jusqu’à sa soixantaine. Son père était artiste peintre et sa mère faisait des ménages. En tant qu’ainée de la famille, elle s’occupait souvent de ses frères et sœurs. Même si sa famille avait peu d’argent, certains divertissements étaient possibles occasionnellement: jeux, cirque, cinéma… Une fois son brevet des collèges obtenu à 14 ans, elle aurait bien voulu continuer l’école.

Pour faute de moyens financiers, elle commença rapidement à faire des ménages et enchaina divers emplois. Avec l’aide de sa mère, elle entra finalement en condition et devient fille de cuisine dans une grande maison. Enchainant les places, elle a connue différents employeurs et monta en garde en tant que cuisinière.

Ce que j’ai aimé avec ce témoignage, c’est qu’il se lit aisément. On a l’impression que Margaret est là avec nous et qu’elle nous raconte directement son histoire. Et quelle aventure ! Les nombreux témoignages nous font prendre conscience des conditions de vie et des différences entre “Eux” (les gens d’en haut) et les gens d’en bas. Dans une même maison, la frontière est énorme. Elle nous raconte de nombreuses anecdotes saugrenues de tâches quotidiennes à réaliser, comme repasser des lacets… Ces collègues ne sont pas épargnés, et on ne peut que rigoler de commentaires en commentaires.

Le texte est très bien écrit et on s’imagine facilement l’environnement qui nous est décrit. La multitude de souvenirs qu’elle nous confie, font à la fois rire et peuvent être aussi révoltant. Je retiens par exemple cet aristocrate qui les faisait descendre en pleine nuit pour toucher leurs bigoudis, en échange d’une pièce…

Elle m’a regardée comme si j’étais quelque chose de pas tout à fait humain. Elle n’a pas prononcé un mot, elle est juste restée là, à me regarder. Elle avait visiblement du mal à croire que quelqu’un comme moi pouvait marcher et respirer. Je me suis dit : “qu’est-ce qu’il y a ? j’ai mon bonnet, mon tablier, mes bas noirs, mes chaussures…Je n’arrivais pas à trouver ce qui n’allait pas. Finalement elle a articulé :
“Langley, vous ne devez jamais, jamais vous m’entendez, sous aucun prétexte, me tendre quoique ce soit avec vos mains; toujours sur un plateau d’argent.

Mais il est vrai qu’une fois une grande partie du roman lu, la redondance s’installe. On rigole beaucoup moins, même si le récit reste intéressant.

En soit, une lecture très agréable avec de nombreuses notes d’humour et qui nous ouvre les portes de la domesticité anglaise au début du XXème siècle.

note 3,5 étoiles